Exposition Léonard de Vinci Au Louvre : entre l’éternité et l’universalité

L’exposition Léonard de Vinci (se déroulant d’octobre 2019 à février 2020) a été qualifiée comme l’événement majeur de la nouvelle saison dans le milieu muséal européen. Dès l’ouverture de la prévente des tickets d’entrée, le site internet du Louvre s’est retrouvé débordé par la trop grande affluence. L’exposition a engendré une centaine de publications dans la presse et a provoqué une tension considérable entre la France et l’Italie. Mais pourquoi une telle résonnance ?

Tout d’abord, la figure de Léonard de Vinci et son héritage artistique restent universels non seulement en Europe mais dans le monde entier. C’est un peintre qui est entré dans notre inconscience culturelle; son nom est connu même parmi ceux qui n’ont aucun rapport avec l’art. Il faut souligner que cette universalité est due à la médiatisation extrême de Léonard de Vinci et de sa peinture et que parfois cette médiatisation est à la limite de la banalisation.

 

Canard de bain la Joconde  qui  « donne une touche de renaissance à votre salle de bains »

Mais comment Léonard de Vinci a acquis le statut exceptionnel qu’il possède aujourd’hui dans le patrimoine culturel ainsi que dans la conscience collective? Pour répondre à cette question, prenons sa Joconde comme un exemple à explorer.

Déjà après sa création, le tableau a été reconnu comme un chef-d’oeuvre par les contemporains et par le milieu professionnel de Léonard de Vinci, ce qui a contribué dans son succés.

Après la mort du peintre, la Joconde occupe sa place dans la collection de François I; plus tard, elle réside dans le château de Versailles; encore plus tard, elle a été accrochée dans la chambre à coucher de Napoléon Ier. Une telle cartographie de déplacements a également participé dans l’augmentation de son prestige.

L’un des rôles principaux dans le changement du statut de la Joconde a été donné aux hommes de lettres qui ont modifié sa perception aux yeux du public. Pour eux, elle devient l’incarnation de la femme fatale et c’était Théophile Gautier qui, pour la première fois, a attiré notre attention sur son fameux sourire, «le sourire du sphinx  qui vous promet les plaisirs inconnus».

En plus, le vol du tableau en 1911 a fait de la Joconde une véritable «star» des médias tandis que la diplomatie culturelle française l’a transformée en ambassadrice culturelle pour apaiser les tensions politiques et c’est ainsi que la Joconde devient une oeuvre culte.

 

De Vinci reste toujours un objet de diplomatie culturelle internationale. La discorde opposant la France et l’Italie autour du prêt de certaines oeuvres en vue de l’exposition, notamment de l’Homme de Vitruve, dessin immensément célèbre du maître. Cette dispute a ravivé un désaccord ancestral, l’Italie revendiquant que Léonard de Vinci était avant tout italien. Elle s’est achevée in extremis : les oeuvres ont pu être accrochées quelques jours avant l’ouverture de l’exposition .Ceci pose la question de l’appropriation d’un artiste ou d’un symbole: nous pouvons penser au tableau d’Ingres représentant De Vinci mourant dans les bras de François Ier, fantasmant une adoption symbolique du peintre. Le ministre de la culture italienne Alberto Bonisoli affirmait d’ailleurs que de De Vinci fait partie d’ “ un patrimoine non seulement italien mais européen et universel ”, posant la question à une échelle bien plus large.

Pour conclure, il faut dire que même malgré le fait que l’époque de la Renaissance est très éloignée de la nôtre et qu’on a du mal à complètement saisir le contexte dans lequel Léonard de Vinci a travaillé, cependant son nom a un effet magique sur les gens d’aujourd’hui, ce qui nous prouve un immense intérêt qu’on a autour de cette exposition :  “I am struck by how we invent this figure for the 21st century. I don’t mean to sound like a mystical priest, but on some level these paintings communicate soul to soul, he said. “Great art does work on people in mysterious ways ”, comme le dit Luke Syson, curateur anglais.

Marine Chaussin et Veronika Smus

 

 1974 : la Joconde à Moscou

 

Sitographie :

 

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